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  • Photo du rédacteurJoël GUERRIAU

Proposition de loi relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventi

Le Sénat examine aujourd’hui une proposition de loi visant à établir un contrôle des armes moderne et simplifié. Proposition de loi présentée par l’UMP et qui a fait l’unanimité des sénateurs de gauche comme de droite. Voici mon intervention au nom du groupe de l’Union centriste et républicaine.

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Mes chers collègues,

Nous assistons chaque jour à la multiplication très inquiétante de l’usage d’armes de guerre au cœur même de nos centres-villes. La semaine passée, pas moins de trois fusillades à la Kalashnikov, faisant trois morts et trois blessés graves, ont défrayé la chronique. A plusieurs reprises, les malfaiteurs n’ont pas hésité à faire usage de leurs armes notamment à l’encontre des forces de l’ordre. Un policier a d’ailleurs été grièvement blessé. Ces évènements violents et tragiques nous interpellent.

Il est bien évident que le texte qui nous est proposé aujourd’hui ne résoudra pas tous les problèmes. Mais une chose est sûre, la législation sur les armes doit permettre la répression la plus efficace possible pour lutter contre le trafic d’armes et, en particulier, la circulation illicite d’armes de guerre. Le criminologue Alain Bauer indiquait récemment au journal le Monde que la France connaît aujourd’hui sa troisième vague d’importation illégale d’armes de guerre avec le pillage des arsenaux libyens depuis la chute de Mouammar Kadhafi. Actuellement, un fusil d’assaut neuf de type kalachnikov se négocie dans les cités aux alentours de 1 000 euros ; beaucoup moins pour une arme d’occasion…

La prolifération d’arme de guerre dans les cités ne risque-t-elle pas de s’accentuer du fait des reflexes d’auto défense de personnes qui considéreront nécessaire de se protéger dans un contexte où le sentiment d’insécurité grandirait ?

Je souhaite attirer votre attention sur un fait : des personnes fragiles ou déséquilibrées peuvent nous sembler parfaitement normales. Nous vivons dans un monde de plus en plus virtualisé. Nos écrans cinématographiques et télévisés propagent des scènes violentes et font la publicité de jeux vidéo qui sèment la mort. Pire, le scénario de ces jeux banalise l’acte de tuer. Dans cet univers la frontière entre le virtuel et le réel est mince, voire inexistante, pour certains.

Les films ultra-violents, « Tueurs nés », « Reservoir dogs », « Kill Bill », sans parler des récentes productions japonaises, et l’escalade des jeux vidéo violents peuvent chaque jour influencer des enfants et des adolescents qui finissent par confondre virtualité et réalité.

Je l’ai malheureusement vécu dans ma commune, à Saint-Sébastien-sur-Loire. Le 3 juin 2002, un garçon de 17 ans, vivant dans un cadre familial aisé, fasciné par le film « Scream », a assassiné en soirée Alice Beaupère, une adorable jeune fille de 15 ans, de 42 coups de couteaux. Le lendemain matin, interrogé en prison, il nous a dit froidement : « pourquoi vous ne rembobinez pas le film… ». Il ne manifestait aucun remords. Et il était clair qu’il n’avait pas pleinement conscience de la terrible gravité de son acte. J’éprouve encore à l’instant où je vous en parle une forte émotion, quand je pense qu’Alice est décédée pour rien en laissant ses parents et ses amis dans une douleur irréparable.

Imaginez un instant que mon jeune meurtrier de Saint-Sébastien, au lieu d’une arme blanche, s’inspire d’un jeu vidéo et massacre à l’arme de guerre des dizaines d’innocents dans un collège. Aux Etats-Unis, c’est en moyenne 83 personnes qui meurent par arme à feu chaque jour.

Toutes les armes posent évidemment problème ; mais les cas de ces derniers jours impliquent des délinquants en possession d’armes de guerre de gros calibre dont la dangerosité est d’autant plus préoccupante. Il n’existe pas de statistiques officielles sur la circulation de kalachnikovs sur notre territoire. Mais les saisies constituent un indicateur. Depuis le début de l’année 2011, 3 355 armes à feu ont été saisies, dont près de 380 armes de guerre. Dans les Bouches-du-Rhône, la préfecture de police a évalué la proportion de fusils d’assaut parmi les armes à feu saisies cette année. Il en ressort que les kalachnikovs représentent un quart des armes saisies depuis le début 2011. Ces constats nous invitent à réfléchir sur l’adéquation de notre arsenal juridique avec ces évolutions de la criminalité. Dans un contexte de crise économique, nous pouvons craindre de voir se développer des bandes armées se livrant à des actes criminels de plus en plus violents.

Le fond du problème, c’est l’utilisation des armes à feu, et notamment de celles qui font l’objet d’une possession illégale ; mais si l’on veut traiter de l’illégalité, il faut bien commencer par poser la question générale de la possession des armes à feu. Notre intention à travers ce texte n’est pas d’en restreindre l’accès à ceux qui ont le droit d’en posséder. Parce qu’ils sont collectionneurs, chasseurs ou tireurs sportifs, des milliers de Français détiennent légalement et de la manière la plus pacifique des armes à leur domicile. Il s’agit ici de nous doter d’outils législatifs simples permettant de mener de la manière la plus efficace possible le combat contre ceux qui utilisent les armes à feu dans un cadre qui n’est ni approprié, ni légal, ni républicain.

Aux huit catégories d’armes à feu existant aujourd’hui, la proposition de loi fait le choix, en s’inspirant très largement de la réglementation européenne issue notamment de la directive européenne du 18 juin 1991, de substituer quatre catégories. La classification actuelle pose un problème de lisibilité mais pas seulement. Les critères retenus n’étaient pas pertinents : le bon critère, c’est effectivement, comme le propose ce texte, la « dangerosité » de l’arme. La nouvelle classification est, à mon sens, plus simple, plus lisible et donc plus facilement applicable mais elle est aussi plus pertinente. L’introduction de cette notion de dangerosité comme principe de classement des armes constitue une importante innovation juridique, résultant de la volonté de mettre fin au classement actuel dans lequel des armes de dangerosité comparable peuvent se trouver dans des catégories différentes. Votre prédécesseur, Monsieur le ministre, avait qualifié la législation actuelle, largement héritée du décret-loi de 1939, « d’inefficace car trop tatillonne pour les honnêtes gens et impuissante face aux trafiquants ». Cet avis est très largement partagé. Je suis persuadé que le texte que l’on nous propose aujourd’hui va dans le bon sens et permettra d’éviter les deux écueils que je viens de rappeler.

Nous approuvons l’élargissement de la faculté au préfet de pouvoir saisir toute armes, qu’elles soient soumises à autorisation ou à déclaration : cette mesure préventive est judicieuse.

Le groupe de l’Union centriste et républicaine tiens à saluer le travail effectué par notre rapporteur et par la commission des Lois. Ce travail permet d’aboutir à un texte qui apparait aujourd’hui équilibré entre les contraintes qui doivent encadrer l’acquisition et la détention d’armes, d’une part, et la lutte contre le trafic d’armes, d’autre part. Nous disposerons ainsi d’un arsenal législatif renforcé qu’il conviendra d’appliquer le plus efficacement possible sur l’ensemble de notre territoire.

Le groupe de l’Union centriste et républicaine votera donc en faveur de cette proposition de loi.

Je vous remercie de votre attention.

Le processus législatif sur le site du Sénat

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